Puisque nous existons tous dans l’espace mouvant de l’ici et maintenant, il n’y a rien à quoi se tenir ni personne à qui faire confiance. Les voeux, les promesses et les votes sont des créations frivoles de l’esprit pratique qui se replie constamment sur soi. Allez! Présentez-vous au vent et aux vagues rugissantes.
Monica Hathaway, M104
traduction de Maryse Pelletier
Si vous ne pouviez voir, entendre, sentir, goûter ou toucher, vous seriez incapables de penser l’existence d’un je (qui est vous). À coup sûr, le miracle des sens est à l’origine de la création d’un terrain vague qui nourrit la machine dont la seule fonction est le recyclage de l’être.
Monica Hathaway, M104
traduction Maryse pelletier
C’est peut-être vrai que le monde est un théâtre dans lequel nous sommes tous des acteurs, sauf que, d’un moment à l’autre nous changeons de rôle. Dans notre texte, nous sommes le personnage principal ; dans celui des autres, nous sommes soit un personnage secondaire, un personnage tertiaire ou un figurant.
Quand la lune est pleine, les étoiles pâlissent.
Monica Hathaway, M104
traduction de Maryse Pelletier
Quand on travaille dans le sens samsarique (celui de la roue de l’existence, non spirituel), on s’attend à être payés pour les efforts qu’on fait en vue du bien commun ou de la cause qu’on a décidé de soutenir. Ça peut être de vendre des cosmétiques à des adolescents boutonneux ou de vieilles personnes ridées, ou des remèdes contre le SIDA et le cancer à des malades spirituels. Peu importe ! Notre conditionnement nous amène à espérer une rétribution pour notre travail.
Le travail sur le sentier (de la spiritualité), c’est autre chose. Il ne vous assure ni ne vous promet que ce que vous recherchez dans le travail samsarique sera encouragé par des récompenses, et il ne vous promet pas de vous hisser à un niveau de vie différent et prometteur. Le travail sur le sentier vous offre la perspective d’accueillir des désirs insatisfaits qui s’égrènent comme une image en papier mâché trempée d’eau, et d’en être reconnaissants. Les désirs n’y sont pas comblés. Ils s’anéantissent, ils disparaissent comme des épaves et des débris flottant sur la mer des fous. Les récompenses et les punitions sont des orgasmes générés par la séduction de désirs démesurés et ne génèrent que davantage de désir d’en expérimenter d’autres. Ils constituent une barrière d’insatisfaction infranchissable. On n’en a jamais assez. Jamais.
Le travail sur le sentier permet de voir à travers la solidité des désirs aussi bien qu’à travers la barrière qui les rend inaccessibles. Ces deux-là ne font qu’un. Ils sont reconnus pour ce qu’ils sont, des mirages transparents dans l’espace ouvert, et n’ont aucune vie que celle que vous leur donnez.
Monica Hathaway, M104
traduction de Maryse Pelletier
Je suis bonne, généreuse, réfléchie, je me soucie des autres comme ils devraient se soucier de moi. J’obéis à l’adage : « Ne fais pas aux autres ce que tu ne veux pas qu’on te fasse ». Je trouve des moyens d’agir à la place des autres de sorte qu’ils n’ont pas à agir eux-mêmes. Décidément, je suis une énergie parentale mâle et femelle qui ne veut pas, ne pense même pas à ce que quiconque se libère de sa dépendance à la famille et aux amis de la famille. Et, naturellement, avec les autres, nous parlons des problèmes de tout le monde et nous essayons de notre mieux de résoudre leurs problèmes à leur place avant même qu’ils sachent qu’ils ont des problèmes.
Notre groupe bavard, cancanier, ennuyant à en être agaçant, n’attend jamais qu’on lui demande son aide. Nous aidons les autres à faire tout ce qu’ils doivent faire, qu’ils en aient besoin ou pas. Nous refusons que qui que ce soit pose des gestes inconnus de nous et desquels nous sommes exclus. Nous nous plaisons particulièrement à dire : « C’était un éléphant blanc, c’était visible dès le point de départ que ça n’avait pas l’ombre d’une chance de fonctionner ».
Nous représentons un horrible modèle des bonnes manières de ce monde, et nous nous assurons que personne n’échappe à notre microscopique ou macroscopique recherche du bien, du bon et du beau, opposé au mauvais, à la laideur et à l’absence de coopération. Et puis, nous disposons de plusieurs types d’armes pour enrayer le mauvais, le non coopératif et le laid, et de plusieurs récompenses à décerner au bien, au bon et à la beauté.
Est-ce que ça ne vous frappe pas au cœur et au cul, est-ce que ça ne vous agace pas suprêmement, cette participation active au roulement de la roue de l’existence samsarique ? Si ça ne le fait pas, vous êtes vraiment une cause perdue.
Monica Hathaway, M104
traduction de Maryse Pelletier
Les mots sont certainement des créations fascinantes, séduisantes. Les lettres qui les composent recèlent de multiples variétés de peur et d’espoir. Ils peuvent être utilisés pour décrire les fantasmes de vie parfaite qu’entretiennent les êtres humains. Les librairies de notre monde sont pleines à craquer de volumes de cet acabit, qu’on s’amuse à appliquer aux circonstances dans lesquelles on vit.
Les frelons envahissent la galerie sur laquelle je suis assise. Ils rêvent d’un endroit parfaitement sécuritaire pour s’accoupler, loin de l’œil inquisiteur des autres, à leur insu. – Je suis un être humain. Je parle en leur nom en des termes qui semblent décrire leur présence sur la galerie. Je pourrais me féliciter de ma perspicacité, mais j’hésite à m’en décerner le trophée.
Monica Hathaway, M104
traduction Maryse Pelletier
J’ai noté que c’est une habitude qu’ont les êtres vivants d’essayer de vivre plusieurs vies à la fois. On emprunte des événements provenant de l’expérience d’une autre personne et on essaie de les reproduire, même de les améliorer, dans notre propre vie. Partout, on appellerait cela du plagiat : choisir un passage de ce qu’une autre personne a dit ou écrit, et prétendre que ça vous arrive ou que ça vous est arrivé.
J’ai eu la chance de me rendre compte, au cours de ma vie, que cette façon de faire naît de l’avidité, de la soif de vivre, et fait de vous un voleur beaucoup plus important que si vous dérobiez des millions de dollars à banque. Le châtiment est à la hauteur du crime ; vous êtes tellement occupé à voler la vie des autres que vous avez très peu de vie à vivre qui vous appartient. Prendre un exemple et tenter de le vivre est comme essayer de vivre la vie d’un papillon que vous avez épinglé sur une planche, encadré et accroché au mur. Laisser tomber le plagiat est un geste extraordinaire de laisser-aller pour devenir vous-même. Essayez-le, Ça en vaut la peine. Vous pourriez expérimenter une intensification de votre respiration qui ravive la réalité du présent. Soyez vous-même, pour changer (bellement).
Premièrement, cessez de vouloir être un exemple sur lequel les autres se moulent. Un exemple est une structure. Sa fonction est très douteuse et ne peut que donner lieu à une multitude d’interprétations limitatives. Les exemples sociaux ou antisociaux sont des papillons épinglés sur une planche, encadrés et accrochés au mur ; les deux sont morts. Un exemple « vivant » est une fantaisie après laquelle courent les esprits affamés qui ne connaissent pas l’ici et maintenant, et cherchent la vie dans le passé ou le futur ; ils refusent de vivre au présent de peur que les autres les transforment en exemples — un – deux – trois — vendu !, comme à l’encan, au plus offrant. Prochain article ?
Être un exemple ou en suivre un pourrait être seulement une autre vaine et glorieuse tentative de prouver l’immortalité en utilisant des procédés manufacturés.
Monica Hathaway, M104
traduction Maryse Pelletier