Author Archives: marypele

La file

Je fais la file depuis 40 heures maintenant. Je ne sais comment je réussis à tenir debout malgré mon genou désagrégé. Le gauche. Celui qui a été frappé durant la manifestation contre la prise de pouvoir par les « génies », comme ils s’appellent eux-mêmes, nos dirigeants. En fait, ils laissent l’I.A. gouverner. Ils n’ont aucune idée nouvelle, ne peuvent pas faire d’analyses qui ne soient déjà remâchées puisque, on le sait, l’I. A. n’est qu’un repas composé de restes, assemblé à partir de ce qu’on lui donne à gober.

40 heures, bientôt 41.

Il faut absolument que je tienne le coup.

Au bout de la file, qui avance à pas de tortue – je sais, c’est une remarque surannée, mais j’ai ma propre I.A. qui me remâche le vocabulaire –, il y a la clinique. Et l’opération pour mon genou. J’ai eu de la chance, mon nom a été tiré au sort. Je faisais partie de celles qui ont une véritable possibilité de vivre plus longtemps que 5 ans. Parce qu’on ne nous opère que quand on peut espérer vivre 5 ans de plus que l’âge où on vous opère. C’est la nouvelle règle des Génies. Les fonds publics alloués à la santé ont constamment diminué au profit de ceux affectés à la Défense, et c’est l’I.A. qui choisit à présent les sujets qui se font réparer le squelette, et quel os pourront être refaits . J’ai eu la chance d’attraper un bon numéro, de sorte que j’ai la « chance » de faire la file depuis bientôt 2 jours.

Dans 5 heures, si je ne suis pas arrivée à la porte de la clinique, je serai renvoyée. Parce qu’on renvoie systématiquement les personnes qui atteignent 80 ans.

Je n’ai jamais aimé les anniversaires, celui-là moins que les 79 autres. Il décidera si je mourrai de douleur dans un fauteuil roulant ou si je continuerai à faire pousser de rares légumes dans le petit lopin de terre que j’ai réussi à garder malgré la récupération par les Génies des terres cultivables, celles qui le sont encore après la déflagration d’il y a 10 ans. Une déflagration qui a fait tomber sur nos territoires une poussière qui assassine les nutriments. Mais moi j’avais mis des plastiques sur mon potager, par habitude, pour que les herbes folles meurent au soleil du printemps. À l’âge que j’ai, je ne me penche plus aussi facilement pour désherber. Ces toiles ont, finalement, sauvé mes buttes, qui donnent encore les légumes dont je me nourris.

Il y a maintenant 50 personnes devant moi. Pas toutes des vieilles personnes – maintenant on dit les Presque Passées – j’ai du mal à me faire à ce vocabulaire. En tant qu’écrivaine, jadis, je me faisais un honneur d’utiliser des termes précis, justes, éloquents. Mais maintenant, la règle est d’amenuiser, de détourner, de voiler le réel pour ne de laisser que des images rassurantes, et pire : humoristiques. Comme si on vous disait de regarder une porte toute bien décorée, et d’oublier que cette porte mène à la prison où vous serez, où vous êtes, enfermés, comme si vous pouviez apprécier cet humour, douteux et surfait.

40 personnes.

Mon genou me fait très mal. Heureusement qu’il fait froid, il s’est un peu engourdi. Devant moi, une mère avec ses trois enfants. Normalement, on lui donnerait la priorité, les enfants sont rares, maintenant, et je ne sais pourquoi elle et son petit groupe avancent aussi lentement que moi. Peut-être parce que ses petits ont les cheveux crépus. Pourtant, ils sont beaux. Et éveillés. Depuis le temps qu’ils attendent, ils n’ont pas quitté leur écran; ils ont pleuré, et ils ont ri, je les ai vus, je les ai entendus : leur rire est encore sonore. Maintenant, on nous encourage à rire silencieusement, comme si c’était toujours possible.

Voilà, je n’en ai plus que pour deux heures à faire la file.

Deux heures.

J’y arriverai. Mon genou sera réparé par la machine à opérer – qui ne se trompe jamais, sauf quand elle se trompe. Mais il ne faut pas le dire, ni même le penser.

Je n’ai pas le choix de me faire opérer si je veux continuer à vivre les cinq ans prévus. Et peut-être plus. Dans cinq ans, les Génies auront peut-être perdu le pouvoir; ils seront alors remplacés par les « Efficaces », qui leur ressemblent, à cette différence près que ceux-là nous promettent de ne plus imposer de limite d’âge à la réparation des corps ; ils auront besoin de vraies personnes pour regarder les écrans de temps à autre puisque même l’I.A. ne peut plus détecter les vraies personnes de celles qu’elle génère. L’I.A. qui, dans sa rage de croissance, aura inventé dans cinq ans des populations entières de fausses identités. Il n’y a qu’un œil humain pour les détecter. Finalement, nos corps ne sont pas si mal faits. Vraiment pas si mal.

Voilà. J’y suis. J’entre dans l’immeuble, l’hôpital, enfin, ce truc gris et aveugle érigé, abrupt, au bout du trottoir.

Un robot me prend par la main et me guide. Heureusement parce que tout est noir. Je suppose que les « Génies » veulent éviter qu’on ait peur de la machine qui opère ou de ce qu’il y a autour. Il se peut aussi que les Génies nous aient menti – ça leur est arrivé – et que je sois sacrifiée, si près du moment limite. On va m’endormir. Au cas où on m’éliminerait, je fais mes adieux. Adieux à ceux de ma famille qui vivent encore – ils recevront mon message télépathique, j’espère – et à la planète. Notre ci-devant planète dont certaines régions sont encore saines. Et adieu à ma vie, cette chose ronde, pleine de trous et de batailles, que j’ai eu la chance de vivre dans une enclave verte.

Je vais dormir maintenant. Dormir. Un des seuls conforts qu’il reste.

Dormir.

Mon corps et moi

Je me sens de plus en plus détachée de mon corps. Je suis à l’intérieur de ce corps, mais ce corps n’est pas moi. Il n’en est que le réceptacle. Et, plus il se fragilise, plus je me rends compte de la division entre nous deux. Bien sûr, s’il se fragilise trop, je deviendrai incapable de réfléchir, de penser, de m’émouvoir ; j’en suis dépendante : s’il n’est pas là, je n’y suis pas non plus (du moins je le pense) mais il n’est pas ma vie, mon être. Pas totalement.

C’est infiniment différent de la sensation qu’on a, plus jeune, selon laquelle notre corps est nous, qu’il est notre personnalité pareille à aucune autre, qu’il nous faut développer, mettre en valeur, faire briller, affiner pour bien paraître, pour réussir.

Ces années-ci, je suis beaucoup plus portée à préserver sa santé mentale qu’à refaire mon maquillage.

Aveu

Il y a des jours où je me sens tellement en état d’insécurité que je me demande si je serai capable de bien faire les choses quand je mourrai (est-ce que ma tignasse est démêlée, est-ce que ma jaquette me va au teint, est-ce que je mets les mains dessus ou dessous le drap, etc)

Ça finit par être amusant, non?

L’esthétique

Je me méfie comme la peste de l’esthétique, du beau geste, de la belle jambe, du beau bras et de tous les qualificatifs qui vont et viennent avec. La vision esthétique est une vision polluée en ce qu’elle éloigne de la réalité, en ce qu’elle privilégie une seule sorte de geste et qu’ainsi elle divise radicalement le monde en deux parties, l’une acceptable et l’autre, rejetée. C’est le rétrécissement des manifestations de vie, le resserrement de l’univers disponible. Qu’on choisisse cette vision en toute connaissance de cause est une manifestation de l’attachement à son ego, à ce qui plaît et rassure. C’est normal, mais dangereux. Dans cette vision qui, d’ailleurs, éclate régulièrement, il n’est pas de chair possible. Seules les lignes sont admises, les lignes minces. Portant, les corps sont faits de chair, ils sont tout mouvement.

Le guerrier

A Zhao warrior donned a braided hat
His scimitar gleamed like frost and snow
His white steel clad in a silver saddle
As quick as fleeting light it galloped away
Within ten steps and one foe falls
Within a thousand miles and none can halt
When the deed is done
To a life of anonimity he returns

Le guerrier Zhao tresse un chapeau de paille
Son sabre luit comme glace et neige
Son armure est blanche sur sa selle d’argent
Rapide comme la lumière il galope
Dix pas seulement et l’ennemi tombe
Mille milles plus loin rien ne l’arrête
Une fois sa tâche accomplie
Il retourne à une vie anonyme

Lever le doigt

Je suis allongée, prête à dormir. Dans mon demi-sommeil, j’ai conscience, c’est précis, que je lève l’index de la main gauche. Encore. Il m’arrive souvent de lever ce doigt, je ne sais pourquoi. Le geste est involontaire. Pourquoi, en effet, lèverais-je le doigt juste avant de m’endormir, par exemple? Je ne montre rien à personne, je ne parle pas, je ne… Est-ce une pensée spécifique qui m’amène à tendre l’index? Est-ce une habitude, tout simplement, mais, si c’est le cas, d‘où vient-elle?

Dans un demi-sommeil, j’explore mon esprit. Quelle pensée ai-je eu, qui s’est connectée à mon index et l’a fait bouger? Le potager à commencer? Le voyage qui ne m’a pas laissée courbaturée? Les cinq heures de route à venir pour me rendre voir la famille dans deux jours? La question sur le personnage principal de la série chinoise que je visionne, et qui, je le sens, va se faire torturer dans deux épisodes?

Je me perds. J’explore une forêt de pensées sans pouvoir suivre un sentier. Pendant cette exploration, je surveille mon doigt. Lèvera-t-il ou pas. Le voilà qui… Zut, j’ai encore perdu la pensée qui précédait le geste involontaire.

Bon, suffit pour cette nuit. Je recommencerai la recherche une autre nuit, un autre jour. Je pose mes mains bien à plat sur le drap et je me laisse aller dans le champ méconnu des blés sous le vent que je foule du pied et qui mènent au sommeil.

Mais voilà que, maintenant, c’est mon pouce qui…

Se réveiller, encore

Se réveiller à moitié, à cause d’un son aigu et répétitif qui perce la nuit et monte du corps de la maison jusqu’à la chambre tout en haut, se demander d’où provient ce son, il y a plusieurs possibilités, mais ne pas vouloir explorer davantage, le découvrir équivaudrait à devoir se lever, braver la fraîcheur de la nuit dans la maison dont la température nocturne est plus fraîche que celle du jour, aller jusqu’au réfrigérateur tout en bas ou jusqu’à la balayeuse au même endroit, vouloir se rendormir pour refuser de régler le problème, se sentir coupable, rassembler le peu de courage qu’on a à cette heure avancée et essayer d’identifier le bruit d’après sa fréquence et sa place dans la gamme des aigus (trois sons répétitifs, le frigo : cinq, la balayeuse : deux, le UPS, euh, oublié, a-t-on manqué d’électricité, j’espère que non), repousser les draps, la chaleur du corps de son amoureux et se lever, incertaine, faire un effort d’utilisation de ses méninges qui flottent encore dans l’ouate, descendre jusqu’au sous-sol pour constater que non, le bruit est au rez-de-chaussée, avoir froid aux pieds, ah c’est la balayeuse-robot, la décrocher de son socle, ça lui fermera le caquet, et remonter dans son lit, rendormie déjà, dans la chaleur toujours présente de la douillette…

Se réveiller

Se réveiller par un matin clair, un ciel tout bleu, et écouter le chant des oiseaux qui se répondent d’une branche à l’autre, d’un arbre à l’autre, d’un champ à l’autre ;

Se réveiller déjà lasse, lourde de tout le travail à faire durant la journée ;

Se réveiller à moitié, ne pas savoir où on est durant au moins une seconde angoissante, avoir un peu mal au cœur, puis se dire qu’il faut être courageuse et s’extirper du sommeil, arriver tout à fait au jour pour affronter ce qui s’y passe – la situation, le gouffre -, ouvrir finalement l’œil, résignée, et soupçonner sans preuve que la couche superficielle de notre conscience qui se cache encore derrière un voile translucide peinturluré n’était que le reste d’un rêve désagréable ;

Se réveiller dans le silence le plus total, constater qu’il neige dehors, et comprendre que ce silence n’est que le bruit infiniment délicat du temps qui passe, flocon après flocon, dans la fenêtre ;

Se réveiller, avoir envie de pleurer comme quand on s’est endormie, regretter que le sommeil n’ait été qu’un moment de répit et que le chagrin qui vous courbe les épaules vous ait agrippée à nouveau pour ne plus vous lâcher jusqu’à la nuit qui viendra tard, très tard ;

Se réveiller légère, se demander quel est le programme aujourd’hui, constater qu’il faut d’abord aller voir les fleurs et les tomates – il y a de ces urgences, dans la vie – et se lever d’un bond ;

Se réveiller en retard, le souffle court, se rappeler qu’on avait compté sur quelques petites minutes avant le café pris en vitesse sans déjeuner pour corriger le texte qu’on avait laissé de côté à cause de la fatigue hier soir, paniquer raide parce qu’on n’aura pas le temps de le revoir, le satané texte, avant d’arriver à la réunion pour laquelle on sera sans doute en retard à cause du trafic, se presser de s’habiller, mais de travers, avec des couleurs qui jurent, se dire que, ce soir, on va décider à l’avance quoi porter demain, que ce sera un sujet de préoccupation en moins, parce que, justement, quand on est pressée et donc angoissée, on ne sait plus décider quoi porter, immobilisée devant sa garde-robe, notre insécurité se jetant là-dessus, le choix des vêtements, comme si ça pouvait changer quelque chose à notre sort total, au sort du monde, en fait, dans lequel on n’est qu’un minuscule rouage, qui grince, qui grince ce matin parce que, et se forcer à passer à autre chose parce que temps s’abrège mais ne pas totalement y réussir, même en passant le pas de sa porte, clef de voiture en main, pour se précipiter dans l’habitacle glacé, comme le bras de vitesse qu’on met en première, sans gants parce qu’on les a oubliés, mais peut-être qu’ils sont dans la poche de notre manteau, à voir quand on aura démarré, et puis, et puis, mais ce n’est plus le matin, c’est déjà l’avant-midi et il faut se calmer parce que malgré tout cela on veut arriver en vie à la foutue réunion qui commencera sans doute en retard elle aussi parce que, ma foi, est-ce que la vie n’est pas en retard, dans notre vie? Esquisser un sourire vague à cette question absurde, comment la vie peut-elle être en retard, franchement, c’est nous qui sommes en retard sur elle, non, sur ce que nous avons décidé, dans notre … heu, folie? Agressivité? Efficacité? Et le trafic nous rattrape, ou plutôt nous rattrapons le trafic et il faut désormais être attentive, attentive, attentive, sinon c’est mettre sa vie en danger, mais on a beau être pressée et énervée, ce n’est pas assez, vraiment, vraiment, pour mourir là, dans une voiture encore froide et humide, sur une route à peine déneigée, heureusement qu’on a de bons pneus d’hiver sinon ;

Se réveiller doucement, rester au lit quelque temps, se rouler dans les images qu’on a rapportées de son subconscient à travers le rêve, il y avait un champ rouge et des chevaux marron, puis des voitures qui montaient des côtes tellement abruptes qu’elles finissaient par tourner sur elles-mêmes comme d’épaisses crêpes de fer et redescendre au bas de la côte, à leur point de départ, se demander ce que ça dit de notre caractère, de nous, mais comment se fait-il qu’on cherche encore à se connaître malgré les 70 ans de fréquentation de son égo, de sa personne, de son être, puis soupirer, et replonger, sans réponse, dans les draps en clignant des yeux ;

Se réveiller avec un mal de tête, derrière le front, oui, qui va jusqu’à l’arête du nez, et se demander ce qu’on a fait la veille pour se mériter ça, rien, et voilà qu’on a aussi un peu mal au cou, aux épaules, et se rappeler qu’on a désherbé à coups de pioche quelques mètres carrés de végétation la veille ;

Se réveiller avec la conscience que la vie est éphémère, que nos jours sont comptés, et apprécier l’odeur des draps propres, la lumière qui fait un peu mal aux yeux et se dire que, tant que ça durera, ce sera extraordinaire, la vie ;

Se réveiller avec l’envie d’ouvrir grand portes et fenêtres même s’il pleut et s’il vente, parce qu’on n’en peut plus d’être enfermée dans la prison de son … esprit, sentir l’odeur du foin coupé et de l’herbe mouillée et avoir envie de les rapporter au lit ;

Se réveiller doucement, avec la conscience de respirer, s’émerveiller du travail de ses poumons, de toutes et chacune de leurs alvéoles qui filtrent l’air (le sang?) pour nettoyer nos cellules sanguines, visualiser chacune de ces alvéoles, l’infiniment petit de ce travail gigantesque, sauter à l’infiniment grand et gros, d’une cellule de poumon à un dinosaure, un diplodocus, tiens, se demander laquelle des cellules ne notre corps peut provenir en droite ligne d’un diplodocus – parce que rien ne se perd, rien ne se crée et que tout se transforme n’est-ce pas – saluer au passage la beauté, la grâce, l’élégance et l’intelligence des dauphins et des baleines, se dire qu’il faudrait bien faire un peu d’exercice pour ne pas continuer à prendre du poids, et rester bien au chaud sous l’édredon ;

Se réveiller, se réveiller, encore, encore, encore…

(à suivre, peut-être)

L’Avenir

Jeune, je visualisais l’avenir comme un immense arc de cercle coloré qui s’élançait au firmament devant moi, et dont l’extrémité se perdait derrière la chaîne de montagnes loin, très loin à l’horizon.

Maintenant, l’avenir est une petite boule rouge compacte que je roule dans ma main avant de la développer, et qui me livre tous les matins, à mesure qu’elles se déplient et se déploient, toutes les surprises de la journée.

La prière

On a coutume de penser que la prière est une belle et bonne action, qu’elle nous met en contact avec le Sacré, l’Intemporel, l’Ineffable, l’Éternel. On oublie que, pour prier, il faut se mettre à genoux. C’est-à-dire qu’il faut reconnaître l’existence d’une puissance grossièrement et infiniment plus grande que la nôtre, laquelle aurait, sur nos vies, une influence tout aussi grossière et immense. En fait, pour prier, il faut s’écraser mentalement et émotionnellement, quand ce n’est pas physiquement. Pour prier, il faut être prêt à négocier, à implorer, à supplier et à se donner en pâture, coupés en petits morceaux, pour obtenir ce qu’on veut.

S’il y a des puissances qui ont de l’influence sur nos vies, elles sont soit naturelles – et, dans ce cas, on conviendra qu’il ne sert à rien de demander, même à genoux, à un orage de s’adoucir –, soit spirituelles -, et, dans ce cas, leur nature n’est sans doute pas ce qu’on en pense. Par exemple, c’est idiot de prêter à des « puissances spirituelles » le jugement que nous, humains, portons sur les choses et les événements, et de leur attribuer des désirs aussi insignifiants que les nôtres. D’ailleurs, déjà, imaginer que ces « puissances » ont des désirs est une incongruité. Il n’y a que nous, les humains, qui, poussés par des désirs incessants, générons la haine, les désastres, les remèdes, la jalousie et l’amour autour de nos. C’est notre spécificité, en somme. La colère et la beauté. La guerre et la paix. La justice et la dictature. La turpitude et la générosité.

Quand on ne prie pas, on reste responsables de soi-même et de sa vie, conscients des mystères qui nous entourent, conscients de la peur qu’on ressent devant ces mystères, mais résolus à y faire face debout. 

Debout.